mars 2015 | Les libraires indépendants de Lorraine

31 mars 2015

Les élus au secours des librairies (www.lesechos.fr)

Les libraires pâtissent des prix à la hausse du foncier en centre-ville.
Rachat des baux, exonération fiscale, achats publics… Paris ou la région lyonnaise multiplient les aides.

La fermeture de la librairie La Hune, véritable institution parisienne, a remis en lumière les difficultés des librairies de quartier. Si le tissu résiste tant bien que mal, avec 3.000 librairies indépendantes sur tout le territoire national, il reste fragile. « Les librairies sont structurellement les commerces les moins rentables. Mais en plus, avec la pression foncière, tenir une librairie en plein centre-ville coûte cher », décrypte Guillaume Husson, délégué général du Syndicat de la librairie française (SLF). Or, une librairie est bien plus qu'un créateur d'emplois. Ce commerce pas comme les autres «  joue un rôle unique au niveau local, il s'inscrit dans la communauté de la ville, travaille souvent avec les écoles, avec les cinémas  », rappelle Guillaume Husson. Les acteurs publics l'ont bien compris. Outre l'Etat, longtemps en première ligne, les collectivités locales déploient de plus en plus de mesures de soutien à leurs libraires. Plusieurs conseils régionaux ont mis en place des aides en cas d'extension, de reprise ou d'investissement (Aquitaine, Rhône-Alpes, Poitou-Charentes, Limousin, Haute-Normandie, Bourgogne, Ile-de-France…). « Ces dispositifs existent depuis dix à quinze ans, mais ils se renforcent aujourd'hui », constate Guillaume Husson.

Diversifications dans les produits d'art

La région Rhône-Alpes est une pionnière. Associé à la DRAC, le conseil régional mène une politique de valorisation et de promotion du livre et de la lecture, avec l'appui opérationnel de l'Agence Rhône-Alpes pour le livre et la documentation (Arald). La collectivité territoriale consacre un budget annuel de 2,5 millions d'euros à des aides directes aux auteurs, aux éditeurs et aux libraires indépendants. Elle soutient en particulier la création, la reprise et l'agrandissement de la librairie. « Une politique incitative qui permet notamment d'accompagner un certain nombre de projets de reprise », note Marion Baudouin, déléguée de l'association Libraires en Rhône-Alpes à l'origine du site Internet. La région a ainsi participé au financement à hauteur de 25.000 euros de la reprise de l'ancienne librairie Chapitre à Montélimar. Le nombre de librairies se maintient à 240 dans la région, tous points de vente confondus (hors Maison de la Presse), malgré la fermeture de certains magasins du réseau Chapitre et de Virgin. « Le tissu de librairies de quartier, spécialisées, reste dense », souligne Marion Baudouin, même si certains dossiers de reprise sont plus difficiles à boucler, la création de nouvelle librairie suscitant davantage de vocation.

La maison Decitre est une des réussites locales. Guillaume Decitre vient de reprendre le contrôle du groupe familial fondé à Lyon en 1907, avec le soutien à son capital de l'Institut Mérieux, et de deux banques. Depuis 2008, son chiffre d'affaires a progressé de 53 à 70 millions d'euros, avec une diversification accrue dans la papeterie, les produits d'art et de design dans ses huit magasins rhônalpins. Enfin, la Région, avec la DRAC, a aussi versé 60.000 euros au total pour soutenir un site Internet commun, Chez-mon-libraire.fr., qui réunit 53 librairies indépendantes rhônalpines.

Ventes aux bibliothèques

Autre mesure de plus en plus adoptée par les collectivités locales : à la faveur des labels LiR (librairies indépendantes de référence) lancés en 2009, des dizaines de villes par le biais de leurs intercommunalités (Marseille, Le Havre, Rennes, Nantes, Strasbourg, Lille, Bordeaux ou Paris) exonèrent les librairies labellisées de la contribution économique territoriale (CET). Une autre façon de les dynamiser, mais plus compliquée, est de les intégrer aux achats publics des bibliothèques municipales ou des écoles. Un casse-tête juridique difficile à résoudre compte tenu des règles de neutralité des appels d'offres publics. La Ville de Paris réussit toutefois à creuser plusieurs pistes. « Nous divisons le marché en plusieurs lots et favorisons les multi-attributions, ce qui donne plus de chances à nos libraires d'être choisis », explique Bruno Julliard, premier adjoint à la Ville de Paris, en charge de la culture. Le marché d'acquisition d'ouvrages pour les bibliothèques municipales, qui s'élève à 3,3 millions d'euros sur 2012-2016, a ainsi été divisé en 10 lots, dont un a été attribué au groupement de libraires parisien Librest.

Paris a aussi innové en créant en 2004 une société d'économie mixte (Semaest) chargée de racheter les baux de librairies menacées de fermeture. La municipalité les revend à d'autres libraires ou des galeristes d'art pour des loyers « de 10 à 30 % moins chers que le marché », précise Bruno Julliard. « A terme, l'idée est que les librairies rachètent le bail. » Au total, plus de 70 commerces culturels ont été maintenus, dont 30 librairies. « C'est un outil très efficace mais qui nécessite un fond d'amorçage important de plusieurs millions d'euros », reconnaît Bruno Julliard. Cela n'empêche pas plusieurs villes de regarder cette solution à la loupe. Les villes de Nîmes et de Toulouse s'y intéressent de près. 

(www.lesechos.fr. Page consultée le 31 mars 2015.)

12 mars 2015

La librairie est morte, vive la librairie !

L'association LIL est partenaire depuis trois ans du Challenge de la veille. Ce discours a été prononcé lors de la finale de l'édition 2015, à l'IUT Nancy-Charlemagne, le jeudi 5 février 2015. 

Auteur : Marie-Pierre REIBEL, coordinatrice de l'association LIL

***

Dans un récent discours intitulé Pourquoi notre futur dépend des bibliothèques, de la lecture et de l'imagination, l'écrivain Neil Gaiman a déclaré que « les bibliothèques sont la ligne rouge entre la civilisation et la barbarie ». La lecture est en effet fondamentale dans le développement de l'individu. Elle ne sert pas uniquement à lui permettre de se constituer un bagage intellectuel, non, elle va également lui permettre de développer sa compréhension du monde, son empathie, sa compassion et son imagination. Son imagination. C'est à elle que l'homme doit de disposer aujourd'hui de voitures, de téléphones, d'avions qui font le tour du monde en 24 heures et d'ordinateurs qui transmettent des informations en temps réel. Toutes ces choses ont d'abord été des idées, des rêves, avant de devenir des projets concrets. Les romans de Jules Verne n'étaient que des romans au moment de leur parution. Un siècle plus tard, l'homme a marché sur la lune. Et l'imagination ne sert pas que la technologie. Les philosophes des Lumières œuvraient pour le progrès du monde. Leurs idées ont été déterminantes dans les grands événements de la fin du XVIIIème siècle que sont l'indépendance des États-Unis et la Révolution française. Les livres ont un pouvoir. Et les livres restent.

M Gaiman a donc raison de souligner l'importance des bibliothèques mais il a oublié un point crucial : les librairies font partie intégrante de la « ligne rouge ».
En France, les librairies indépendantes constituent un réseau unique au monde de plus de 3 000 points de vente qui emploient plus de 18 000 personnes. C'est un secteur en difficulté mais dont l'attrait est véritable. Une librairie ferme, une librairie ouvre. La librairie est morte, vive la librairie. Et il n'y a pas deux magasins identiques. Chacun a son identité propre, son petit truc en plus. Plus que des commerces, ce sont des lieux de vie et d'échanges. On pousse la porte et on s'en va traîner dans les rayonnages, choisissant un livre au hasard d'une couverture pour en lire le résumé. Si on se perd, le libraire est tout près pour servir de guide. Et même quand on n'avait pas l'intention d'acheter, on ne repart pas forcément les mains vides. La curiosité y a toute sa place.
On nous dit que notre culture doit désormais passer par des écrans. On nous parle du livre numérique, de tablettes et de liseuses. On nous parle moins des problèmes posés par les différents formats des fichiers, lisibles sur certaines machines et pas sur d'autres. On nous parle moins des problèmes posés par les protections apposées sur ces mêmes fichiers pour éviter le partage ou le piratage. Une chose reste sûre cependant, c'est que le papier fait de la résistance et que les librairies, que l'on croyait mortes, sont toujours là. Au-delà de son contenu, l'objet lui-même conserve son attrait – y compris auprès des jeunes.
On nous dit qu'Internet s'est imposé dans les foyers. On nous parle de la vente en ligne. C'est d'ailleurs toujours le même nom qui revient : Amazon. La société américaine qui a mis en place un site pratique, rapide, moderne, le chouchou des Français. Mais aussi la société qui ne paye pas d'impôts en France, toute réfugiée qu'elle est au Luxembourg ; qui a bénéficié de financements publics pour l'ouverture de ses entrepôts sur le territoire français ; et qui détruit plus d'emplois qu'elle n'en crée. Pourquoi penser que les libraires indépendants ne peuvent pas vous rendre les mêmes services tout en vous permettant, à vous, lecteurs, d'agir à votre niveau pour préserver des emplois et des commerces de proximité ? Savez-vous seulement si votre libraire est connecté ? Connaissez-vous les sites lalibrairie.com, leslibraires.fr ou placedeslibraires.fr ? Tous ces sites vous permettent d'acheter en ligne chez des libraires indépendants de la France entière.

Les librairies ne sont pas de simples commerces, elles sont aussi les gardiennes de cette diversité culturelle si chère au cœur des Français. Une diversité menacée, entre autres, par les ambitions de monopole de certains grands acteurs bien connus, qui veulent prendre toute la place, qui y parviendront si nous les laissons faire, et finiront par ne plus vendre que ce qui se vend, au détriment du reste. Il n'y a pas de mal à vendre des best-sellers. L'économie du livre est ainsi faite que l'argent qu'ils génèrent permet de financer d'autres titres. Le problème se posera quand il n'y aura plus que des best-sellers sur les étagères.
C'est maintenant à vous de réfléchir et de choisir ce que vous voulez préserver et défendre. Quelle place voulez-vous accorder au livre et à l'imagination dans le monde de demain ?


11 mars 2015

Les petits champions de la lecture 2015

Les petits champions de la lecture, c'est un concours national de lecture à voix haute à destination des écoliers de CM2. Les enfants sont invités à lire en public un court texte de leur choix pendant 3 minutes maximum, extrait d’une œuvre de fiction. 
Le jeu est organisé en quatre étapes : le meilleur lecteur d’un groupe participe à une seconde étape à l’échelle locale, puis à une demi-finale à l'échelle régionale et, pour 10 chanceux, une grande finale nationale à la Comédie-Française. Timothée de Fombelle et Guillaume Gallienne sont les parrains de cette troisième édition. 
La seconde étape, la demi-finale départementale, se tiendra :
Mercredi 18 mars
à partir de 15h00
à la librairie Hisler-Even

3 mars 2015

Le numérique en librairie : l'impasse programmée ?

Il existe de nombreux verrous au développement de la librairie numérique indépendante. Listons-les.
Le Kindle
La stratégie d’Amazon est simplissime :
  • Avec un format propriétaire, l’entreprise verrouille son système.
  • Des campagnes de prix agressives permettent ensuite de recruter des lecteurs.
Note : Il n’est pas interdit à un distributeur de proposer le format Mobi. Mais combien de lecteurs vont sortir de l’écosystème Amazon : s’ennuyer à commander sur un store et transférer ensuite le fichier par un cable USB sur leur Kindle ?
IOS : iPad, iPhone
Le système est apparemment plus ouvert mais avec un droit d’entrée impossible à honorer. Apple prend 30% sur toutes les ventes soit autant que la marge brute du revendeur.
Le libraire peut bien proposer une application mais seulement de lecture.
Androïd
Le système a fait rêver le monde entier... pour arriver à une situation similaire à celles des deux concurrents : sur les appareils équipés d’Android 4.0 ou version ultérieure, les applications système Google Play sont préinstallées. Google avertit : « Sachez que la désactivation d’une application intégrée peut entraîner le dysfonctionnement d’autres applications. Les données associées à cette application seront également supprimées. »
Adobe
Alors que les 4 pures players reçoivent les fichiers des distributeurs et peuvent installer leurs propres systèmes de protection, les autres acteurs sont en webservice et dépendent d’Adobe qui propose un système hors de prix et qui fait fuir les clients.

Le résultat
Amazon, Apple, Kobo (avec la FNAC) et Google détiennent 85% du marché. 

Les nouveaux pures players et les librairies indépendantes appuyées par leurs prestataires informatiques se partagent des miettes.

La tendance à la désintermédiation
La désintermédiation est une tendance de fond. Il y a une alliance de facto entre les grands acteurs du numérique et les consommateurs pour se passer des intermédiaires économiques. Aujourd’hui, de nombreux secteurs sont touchés : presse, édition, hôtellerie, taxi....
En quelques années, on assiste à la naissance de géants mondiaux, de véritables rouleaux compresseurs qui écrasent les prix et la concurrence, mais aussi les emplois, les taxes. Prenons, l’exemple d’Uber. Cette société a lancé son application sur Androïd et IOS en 2010 à San Francisco. Elle est déjà présente dans 51 pays. Après la dernière levée de fonds, elle est valorisée à plus de 41 milliards de dollars.
Donc exit les chauffeurs de taxis comme les libraires. Exit le paiement des charges et des taxes. Vive la société du partage... et le retour des taxes féodales payées à des sociétés qui ont pu s’imposer en quelques années grâce à des levées de fonds gigantesques.
Le projet d’Amazon s’inscrit dans ce cadre. Après avoir tué la librairie indépendante dans de nombreux pays, le prochain objectif est bien de se passer des éditeurs et des diffuseurs. A l’heure du numérique, de la mondialisation et de la financiarisation de l’économie, de la réforme du droit d’auteur (en cours à l’échelle européenne), ce devrait être rapide. On verra alors si certains distributeurs diront encore : « les libraires avaient un boulevard devant eux. Ils n’ont pas su construire à cause de divisions ».
Y-a-t-il encore un espoir pour la librairie indépendante ?
Le poids du livre numérique est de 2%. Ce qui est rien. Certains acteurs rêvent M03T. Il existe encore des sociétés comme Booken, Pocketbook. On peut aussi espérer que les distributeurs français arrêtent les DRM Adobe. Le WATERMARK est bien plus efficace pour empêcher la diffusion des fichiers. Et le WATERMARK est bien une protection.
« Avec Internet, le libraire devient bibliothécaire, documentaliste, journaliste, médiateur et commerçant » , c’est l’intitulé de la tribune que j’ai signé en octobre 2010 dans Livres hedbo. Depuis 8 ans, je n’ai cessé d’expérimenter de nouvelles formes de médiation sur Internet qui passent par une amélioration de la structuration des données, l’enrichissement et la personnalisation des contenus, et la scénarisation des catalogues. Il n’y a qu’à consulter les catalogues proposés par Amazon, Apple et Kobo pour voir qu’il y a de la place pour cette démarche MAIS A LA CONDITION que la librairie indépendante trouve un accord avec Booken et Pocketbook pour proposer le lecteur à prix compétitif et que le lecteur puisse télécharger directement sur la liseuse sans que de l’autre côté le libraire soit ruiné par les frais d’affiliation aux différents intermédiaires.
(Source : www.bibliosurf.com / Auteur : Bernard Strainchamps)